Qui est Haïm Arlosorov?

Haïm Arlosoroff a occupé un poste de premier plan au sein du mouvement sioniste durant le mandat britannique sur la Palestine et a dirigé le département politique de l’Agence juive. Partisan d’une coopération pacifique et de compromis avec les Britanniques et les Arabes, il s’est fait pas mal d’ennemis politiques. Il s’est disputé avec son propre camp, notamment David Ben Gourion et a exprimé son opposition aux actions violentes défendues par les sionistes révisionnistes sous la direction de Zeev Jabotinsky.

L'accord Haavara controversé

De manière tout aussi controversée, il a prôné une collaboration avec le gouvernement nazi en Allemagne pour aider le plus grand nombre possible de Juifs allemands à fuir vers la Palestine avant qu'il ne soit trop tard. Il est ainsi à l’initiative de l’accord Haavara, qui autorise les Juifs à faire leur alyah à condition de convertir leurs avoirs en espèces, lesquelles ne peuvent être utilisées que pour acheter des produits allemands exportés vers la Palestine. Cet accord sape les efforts de boycott de l'Allemagne en raison de l'oppression nazie des Juifs, mais il permet également à plus de 60 000 Juifs de fuir devant les nazis et de transférer beaucoup d’argent en Palestine.

Son assassinat : un mystère jamais résolu

Le 16 juin 1933, deux jours seulement après son retour de négociations en Allemagne, Arlozorov est assassiné alors qu’il se promène avec sa femme sur une plage de Tel-Aviv (l’endroit exact se situe entre le Carlton et le Hilton).

Plusieurs théories ont été avancées concernant les auteurs du meurtre. Les sionistes révisionnistes figurent bien évidemment parmi les premiers suspects. Trois d’entre eux fûrent arrêtés, mais un seul condamné avant d’être acquitté en appel, faute de preuves suffisantes. Les sionistes révisionnistes ont toujours nié toute implication dans cette affaire. Pour toute explication, ils mettent en cause deux jeunes Arabes qui voulaient, selon eux, commettre une agression sexuelle sur l’épouse d’Arlozorov, Sima. Une commission d’enquête diligentée en 1982 par Menahem Begin, chef du gouvernement et lui-même issu de cette mouvance révisionniste mettra définitivement hors de cause les trois suspects. C’est dire le sérieux de l’enquête.

Une autre théorie toute aussi spécieuse avance que les tueurs auraient été engagés par le maître de la propagande nazie Joseph Goebbels, dont l'épouse, Magda, aurait été une ancienne maîtresse d'Arlosoroff lorsque ce dernier vivait à Berlin. Rien que ça !

Quoiqu’il en soit, les coupables courtent toujours.

The Arlosoroff Memorial, au lieu de son assassinat

Des funérailles nationales

Haïm Arlozorov est enterré dans la fameux cimetière de Trumpeldor à Tel-Aviv. Son assassinat provoqua une onde de choc dans tout le pays. Ses funérailles ont rassemblées plusieurs dizaines de milliers de personnes dans la ville.

La mémoire d'Arlosoroff est honorée aujourd'hui par les nombreuses rues qui portent son nom dans les villes d'Israël.

Bauhaus, nazis et Tel-Aviv : une histoire surprenante

En rénovant des vieux bâtiments de Tel-Aviv construits dans les années 30, on remarque que pas mal de matériaux de construction, comme le carrelage, le bois ou même le verre, sont estampillés « Made in Germany ». Ce qui est assez surprenant puisque que l’Allemagne était nazie à cette époque.

L’explication se trouve dans un accord passé entre le régime nazi et le mouvement sioniste. Les nazis cherchaient un moyen de se débarrasser à bon compte des Juifs allemands et également de briser le mouvement de boycott mondial à leur encontre. Les sionistes, eux, avaient  pour objectif principal de favoriser l’immigration juive en Palestine et de mobiliser les ressources nécessaires à la réalisation de leur projet de création d’un État juif sur ce territoire.

L'accord Haavara: un pacte avec le diable

Un accord a donc été négocié, notamment par Haïm Arlozorov, alors ministre des Affaires étrangères de facto de l'Agence juive et représentant du parti sioniste Mapaï, avec les autorités nazies. Cet accord a permis aux Juifs allemands de quitter l’Allemagne pour la Palestine, à condition qu'ils vendent au préalable une partie de leurs avoirs (tels que leurs magasins, usines, etc.) aux autorités allemandes. Les fonds générés grâce à ces ventes ont ensuite servi au mouvement sioniste pour l’achat de matériel allemand. Ces biens étaient expédiés en Palestine afin d’y être revendus, le produit de cette revente étant partiellement reversé aux émigrants allemands, tandis qu’une autre partie était conservée par le mouvement sioniste pour contribuer à la construction de l’État juif.

C’est ainsi que des marchandises portant la mention « made in Germany », telles que certains matériaux de construction, ont été utilisées dans les bâtiments de Tel-Aviv.

L'accord connu sous le nom de « Haavara » est resté en vigueur de 1933 à 1939. Il a permis à environ 60 000 Juifs allemands, principalement issus de milieux aisés, d'émigrer. Cette mobilité était conditionnée par la nécessité de disposer de ressources financières suffisantes, exigées tant pour quitter l'Allemagne que pour s'établir en Palestine selon les critères de ressources fixés par les autorités britanniques.

Le sauvetage d'une partie des architectes juifs allemands

Bien que l’accord Haavara ne concerne pas spécifiquement les architectes du Bauhaus, il a indirectement permis à certains d’entre eux, d’émigrer en Palestine et d’y poursuivre leur travail. Cela a contribué à l’essor de l’architecture moderniste à Tel-Aviv, notamment dans le quartier de la Ville blanche, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Un accord controversé

L’accord divisa profondément le mouvement sioniste et les communautés juives de l'époque, en particulier ceux qui soutenaient le boycott complet de l'Allemagne nazie, comme le Congrès Juif Mondial. Les sionistes révisionnistes emmenés par leur chef Zeev Jabotinsky y étaient farouchement opposés. Haïm Arlozorov fût d'ailleurs assassiné sur la plage (près de l’actuel Hilton) à Tel-Aviv le 10 juin 1933, deux jours après son retour d’Allemagne. On a longtemps soupçonné les partisans de Jabotinsky d’être derrière cet assassinat politique. Les auteurs courent toujours.

Cette affaire a été révélée début des années 80. Elle alimente depuis, les théories du complot sur une prétendue collusion entre les sionistes et des nazis.

Pour aller plus loin sur cette histoire suprenante:

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