Tel-Aviv et les mythes fondateurs de l’Etat hébreu

Ne cherchez pas le nom du premier quartier Ahuzat Baït sur une carte de la ville de Tel-Aviv car il n'existe plus. C’était le premier grand projet en dehors de la ville de Jaffa. Il est considéré comme l’acte fondateur de Tel-Aviv car il fait écho au mouvement sioniste dont il est une métaphore. L’histoire officielle de ce quartier est donc nécessairement remplie des mythes fondateurs de l’Etat hébreu.

L'achat de terrains

Tout commence en 1909 lorsque 66 familles juives décident de quitter la vielle ville de Jaffa insalubre et surpeuplée pour créer un nouveau quartier juif moderne dans les faubourgs de la ville. Un comité de quartier (présidé par Arieh Akiva Weiss) est créé et est chargé d’acheter avec des fonds privés les terres sablonneuses appartenant aux bédouins. C’est la genèse de la ville : les Juifs sortent de Jaffa (où les propriétaires sont majoritairement arabes) pour créer une nouvelle vie juive en dehors de la ville. C’est la première ville hébraïque des temps modernes.

Cet acte fondateur a été immortalisée par une photo devenue iconique.

C’est la première référence métaphorique au projet sioniste : les Juifs s’installent par l’acquisition légale de terrain sur un terre vierge. La photo iconique fait également partie du mythe : on y voit des dunes de sables.C'est l'idée "du peuple sans terre pour une terre sans peuple".

Il faut juste se rappeler que les fonds privés ayant permis d’acquérir les terrains ont été obtenus avec le soutien des institutions sionistes (KKL) et que le quartier s’insère en réalité dans un tissu de quartiers préexistants (comme Neve Zedek ou Kerem HaTaimanin).

Le choix du nom du quartier

Le quartier s’appelait au départ (1909) Ahuzat Baït. Mais il a très vite (un an plus tard) été rebaptisé Tel-Aviv (sur proposition du leader sioniste Nahum Sokolov) en référence au roman utopique de T. Herzl « Altneuland » qui décrivait une société juive moderne, créative, éduquée, tolérante et progressiste.

Altneuland = (Alt) ancien - (Neu) nouveau - (land) pays

Tel-Aviv = Tel (monticule, colline renfermant des vestiges archéologiques) – Aviv (printemps, renouveau)

C’est la deuxième référence métaphorique au projet sioniste. La création de Tel-Aviv est en fait la métaphore de la création de l’Etat d’Israël.

Le tirage au sort

Le 11 avril 1909, un tirage au sort - avec des coquillages blancs sur lesquels sont inscrits le noms des familles et des coquillages gris sur lesquels les numéros des lotissement sont inscrits – est organisé pour répartir les lotissements.

C’est la troisième référence métaphorique au projet sioniste qui se veut un projet égalitaire. Il n’y a pas de différence de classe à l’intérieur de la nouvelle société juive. Riches comme pauvres sont logés à la même enseigne. On félicite Meir Dizengof (futur maire de la ville) d'avoir eu la chance d'obtenir son lotissement sur le boulevard Rothschild !

Un quartier moderne

Ce premier quartier se veut assez moderne (eau courante, jardin, etc.) et s’inspire de l’architecture des communautés allemandes chrétiennes Sarona et Walhalla présentes dans la région. Le projet est donc assez symétrique (une rue principale et des rues perpendiculaire)  et est composé de petites maisons individuelles à un ou deux étages maximum:

  • Le quartier se compose d’une grande artère principale, la rue Théodore Herzl (du nom du fondateur du projet sioniste) coupées perpendiculairement par des rues (dont la rue Rothschild, Lilenblum, Ahad Haam et Yehuda Halevi) avec des lotissement pour 66 familles juives. En 1912, il y avait 790 habitants.
  • Le quartier est borné au nord par le premier lycée hébraïque : Herzliya Gymnasium (ainsi nommé en l’honneur de Théodore Herzl- il est en effet le premier établissement de Palestine où l'enseignement est dispensé en hébreu) qui fût détruit en 1960 pour y laisser la place à la tour Shalom (premier gratte-ciel de Tel-Aviv) et au sud par la ligne de chemin de fer Jaffa - Jérusalem.

Ce quartier dénote totalement par rapport à l’agencement des anciens quartiers juifs que l’on trouvent dans les pays arabo-musulmans (mellah) ou en Europe (ghettos). C’est la quatrième référence métaphorique au projet sioniste. L’Israélien n’est plus un Juif ancien confiné dans un quartier insalubre de la ville en marge de la société mais un Juif nouveau et moderne qui prend son destin en main. Tel-Aviv est le premier quartier autonome de l’ère juive moderne. On n’est plus dans l’histoire des Juifs du ghetto. On entre dans la nouvelle histoire moderne des Juifs d’Israël.

Ce quartier comporte un château d’eau permettant l’eau courante dans les maisons. C’est la raison principale pour laquelle le quartier va prendre rapidement de l’importance car tous les quartiers qui vont se développer par la suite autour vont vouloir se raccorder à ce château d’eau et donc faire partie du quarter Ahuzat Baït.

Notre parcours dans le quartier

Lors de cette balade, vous passerez devant ce qui reste du premier cinéma Eden (ouvert en 1914 et laissé à l’abandon depuis 1975 !), du tout premier kioske de la ville (point de rencontre des premiers habitants), de la fontaine de l’artiste Nahum Gutman, du monument des fondateurs de Tel-Aviv (à la place de l’ancien château d’eau), du premier centre commercial avec un ascenseur (passage Pensak), de l’ancienne ambassade de l’URSS (restée célèbre car en partie dynamitée lors d’un attentat dans les années 50), de la synagogue sépharade Ohel Moed et de son dôme impressionnant, de la Shalom Tower (la première tour du pays qui est en réalité l’endroit où se dressait le premier lycée hébraïque d'Israël), du hall de l’indépendance (l’ancienne maison du maire Meir Dizengoff où fût proclamée la naissance de l’Etat d’Israël).

Vous terminerez la balade sur la place Albert 1er (en l’honneur du Roi des Belges) où se dresse le fameux bâtiment la Pagode. La preuve que la ville, contrairement à sa légende véhiculée sur internet, ne se limite pas à son architecture Bauhaus.

Découvrez ici le parcours complet.

Bon à savoir

La municipalité a décidé de créer un petit parcours pédestre (appelé sentier de l’indépendance) balisé par une marque jaune sur le sol. Tout au long du parcours (2 h), il y a des petits écriteaux. Au poste d’information du sentier, on peut se procurer la carte. Toutes les cartes et informations sont fournies gratuitement! Vous pouvez louer une tablette avec la version étendue de l'application Independence Trail et profiter d'une visite interactive et expérientielle accompagnée d'audio, d'extensions de connaissances, de vidéos et d'un selfie amusant à chaque station.

Adresse : Rothschild 11

 

Neve Tzedek : une oasis de charme au cœur de Tel Aviv

C’est le plus vieux quartier juif. Il a été créé au 19ème siècle (1886), bien avant le quartier Ahuzat Baït (1909), qui dans le récit de la fondation de la ville, est le premier quartier hébraïque de l’ère moderne. Le quartier Neve Tzedek a fait l'objet d'une profonde réhabilitation qui a pour une fois respecté l'esprit du quartier d'origine. Ici pas de gratte-ciel mais de petits maisons joliment rénovées. Si bien qu'en quelques années, il est devenu le quartier le plus chic de la capitale. Le prix au m2 des immeubles dépasse tout ce que l'on peut imaginer ailleurs dans le monde.

Au cours de la balade, vous passerez dans des petites ruelles typiques du quartier, le musée Nahum Gutman, le célèbre centre de dance Suzanna Della, l'ancienne gare ferroviaire (HaTachana) et sa voie ferrée transformée en une magnifique promenade.

Découvrir Neve Tzedek à pied

HaTachana (l'ancienne gare ferroviaire)

Allez jusqu'au n° 20 de la rue Herzl. C'est ici que commence un parcours très agréable qui suit l'ancien chemin de fer. L'ancienne gare ferroviaire qui reliait autrefois Jaffa à Jérusalem a fait l'objet d'une profonde réhabilitation au début des années 2000 et vaut la peine d'y passer surtout le jeudi ou le vendredi/samedi (marché bio).

Lisez notre article sur HaTachana

La gare routière

La gare routière est impressionnante par sa grandeur et surtout par sa laideur.  Le bâtiment de 7 étages (dont 2 totalement souterrains) et de plus de 240.000 m2  (dont une grande partie n'a jamais été utilisée) était censé accueillir 1.500 magasins et plus de 1 million de voyageurs (alors que la population israélienne en 1960 ne dépassait pas 3 millions d'individus, cherchez l'erreur ! Cette gare représente l'esprit des années 60 (tout en béton) et sa construction n'en finit pas de diviser les Israéliens. Rien que sa construction a pris plus de 27 ans et elle n'est entrée en service qu'en 1993 après 26 ans de déboires financiers et opérationnels.

C'est très probablement la seule gare routière au monde qui possède un énorme abri anti-bombe nucléaire, une salle de cinéma à six écrans entièrement construite mais jamais utilisée et un tunnel de bus qui est devenu une grotte de chauves-souris et a été déclaré réserve naturelle. On peut la visiter mais il vaut mieux le faire avec un guide car si vous vous perdez dans le bâtiment c'est foutu.

A noter toutefois au cinquième étage, Yung Yiddish a établi une bibliothèque yiddish avec plus de 40 000 livres et une programmation hebdomadaire.

Le quartier oublié (celui qui ne se trouve dans aucun autre guide touristique)

Après avoir vu l'ancienne gare routière, poussez jusque la rue piétonne Neve Sha'anan.("Oasis tranquille"). C'est un quartier qui a été, établi par 400 Juifs qui ont quitté Jaffa en 1922 pour fonder une communauté agricole-urbaine, avec des orangeraies parfumées et de petites les industries. Tout mignon donc. sauf que la construction de la gare routière (d'abord l'ancienne en 1941 puis la nouvelle 100 m plus loin en 1960) a fait péricliter le quartier  qui est devenu malfamé.

C'est ici que vivent désormais les demandeurs d'asile et les travailleurs étrangers sans papiers, ceux que l'on appelle les invisibles de Tel-Aviv. La rue ne se trouve bien évidemment dans aucun guide touristique et c'est normal car elle n'a pas bonne réputation. On peut cependant y trouver une cuisine ethnique authentique du monde entier ainsi que des épiceries exotiques   Mais si vous voulez comprendre Tel-Aviv, il faut aussi pouvoir aborder ses côtés sombres.

HaTachana : une gare transformée en destination branchée

La municipalité de Tel-Aviv a eu la bonne idée il y a quelques années de transformer l'ancienne ligne de chemin de fer qui reliait autrefois Jaffa à Jérusalem en un merveilleux écrin de verdure au milieu de la ville, que l'on appelle désormais le park Hamesila. C'est ici que la jeunesse telavivienne se retrouve le soir tout autour du célèbre complexe culturel Teder.

Au bout du chemin se dresse l’ancienne gare ferroviaire également rénovée. Le destin de cette ligne ferroviaire fût néanmoins assez bref puisqu'elle n'a été en fonction que pendant 60 ans (1892-1948).

L'histoire de la gare

Une balade dans ce complexe totalement rénové il y a quelques années et devenu tendance (on y trouve un marché bio le vendredi et le samedi) permet de retracer sa courte histoire.

Inauguration de la ligne ferroviaire en 1892

La ligne reliant la ville de Jaffa (port depuis l’Antiquité) à Jérusalem (ville sainte) a été inaugurée en 1892. Cette inauguration en grande pompe a même fait l'objet d'une manchette dans le New York Times. Elle était exploitée par une compagnie française : la Société du Chemin de Fer Ottoman de Jaffa à Jérusalem et Prolongements qui avait acquis la concession pour un montant de 1.000.000 de francs français auprès d'un entrepreneur juif (Yosef Navon) qui l’avait lui-même achetée 5.000 livres ottoman au gouvernement de l’époque.

Le temps de trajet pouvait durer environ 6 heures. Il y avait des wagons de première et seconde classe. Théodore Herzl prendra notamment ce train en 1898 pour rencontrer l’empereur Guillaume II à Jérusalem.

Billet de 2ème classe oblitérée, sans date.

Mais alors que la ligne peine à être rentable pour son exploitant, en 1914, c'est la douche froide pour ce dernier. Au début de la Première guerre mondiale, les Turcs décident d'arrêter l'exploitation et de confisquer la concession à la compagne française. Une partie des voies ferrées sera même démantelée et réaffectée à la construction de la ligne de chemin de fer vers Beer Sheva.

La fin de la guerre marque la disparition de l'empire ottoman et le début du mandat britannique sur la Palestine. Le train peut repartir et la ligne sera désormais exploitée par la société des chemins de fer de Palestine (Palestine Railways) qui indemnisera la compagnie française à hauteur de 565.000 livres sterling (beaucoup moins que les 1.500.000 francs français qu'elle escomptait).

Abandon définitif de la ligne en 1948

Le sabotage par les organisations clandestines sionistes entraîne l’arrêt de la ligne en 1946. Après l’indépendance de l'Etat d'Israël, la gare est définitivement fermée par les autorités israéliennes et la zone devient une zone militaire.

Ce n’est qu’au début des années 2000 que d’importants travaux de réhabilitation du site seront entrepris afin de mettre en valeur le site. L'ancienne gare et le bâtiment de l'usine adjacente ont été restaurés et transformés en magasins et restaurants tandis que la zone environnante et les « quais » sont devenus une place ouverte. Pour rappeler aux visiteurs le passé de la gare, un ancien wagon de chemin de fer se dresse à l'entrée du complexe.

Les points d'intérêts

Il est recommandé de visiter HaTachana tous les jeudis soirs pour l'événement "Unique" (Single), de 19h à minuit où les designers et les artistes locaux se réunissent pour un marché en plein air, accompagné d'un DJ en direct. Cet événement est suivi le lendemain par le marché Orbanic (bio urbain), ouvert le vendredi et le samedi.

Kerem Hateimanim : la pépite au coeur de Tel-Aviv

Le quartier Kerem HaTeimanim est assez ancien (1905). Situé au cœur de la ville, il y a une atmosphère particulière qui se dégage de ses petites ruelles étroites bordées de citronniers et d'orangers. De nombreux bâtiments sont encore délabrés ce qui s’explique par le fait qu’il est très difficile voire impossible pour la municipalité de Tel-Aviv de retrouver la trace des premiers propriétaires des terrains. Le registre foncier de l'époque n'était manifestement pas pas très bien tenu ! Pour le reste, le quartier se gentrifie sérieusement au point de perdre tout doucement son âme.

Découvrir le Kerem à pied

Nous commencerons la balade au début du Shouk Hacarmel qui jouxte le quartier. Nous passerons par différentes petites ruelles typiques qui font le charme du quartier. Arrêtez-vous à la terrase du café yom tov pour boire un café botz et découvrir l'épopée des Juifs Yéménites, l'opération "tapis magique" et le drame des enfants volés.

Si c'est l'heure de table, n'hésitez pas à vous arrêter dans un petit resaurant de spécialités yéménites apppelé Ozrei Brothers (Yichye Kapach Street n°30). Clientèle d'habitués, situé dans une ruelle assez calme. Goutez quelques spécialités: lahoh (pain yéménite), baladi, kebab, limonade. Mais attention aux piments!! Ils déménagent ! Vous pouvez également essayer une petite cantine éthiopienne.

Vous terminerez votre parcours en passant devant un torrefacteur improrbable puis dans les ruelles du Shouk consacrées à la viande et aux poissons. Juste pour les odeurs. C'est cela le Moyen-Orient. Tout un poème.

Un peu d'histoire

Une balade dans ce petit quartier charmant et atypique de Tel-Aviv permet de se pencher sur l’histoire de l’immigration des Juifs yéménites qui est probablement l'histoire la plus tragique du retour des Juifs en Israël.

Une première vague d’immigration au début du XXème siècle

La première vague d’immigration se déroule au début du XXème siècle (1904) encouragée par l’organisation sioniste mondiale. Les Juifs yéménites sont à cette époque essentiellement utilisés comme des ouvriers pour remplacer les ouvriers palestiniens arabes. Perçus comme des arabes par les Juifs ashkénazes ils sont relégués parmi les couches inférieures de la société israélienne. Alors qu’ils font pourtant leur Alya au même moment que les futurs pères fondateurs (Ben Gourion, Golda Meir, etc.) venus d’Europe, aucun Juif yéménite ne marquera l’époque.

Comment repérer un telavivien?

On raconte souvent que Tel-Aviv est une ville dynamique et pleine d'énergie, bref une ville qui ne dort jamais. Mais ceux qui écrivent cela n'ont probablement jamais mis les pieds dans cette ville. Tel-Aviv est une ville de trentenaires, célibataires ou avec de jeunes enfants, assez cool.

Les telaviviens se retrouvent quotidiennement sur les terrasses pour discuter et manger. Bref, ils prennent le temps de vivre. A tel point que certains se demandent parfois si les gens travaillent vraiment ici !

En somme, Tel-Aviv est une ville qui vit dans sa bulle, dans une région, le Moyen-Orient, pourtant réputée difficile et violente.

Opération « Tapis magique »

La deuxième vague d’immigration importante se déroule avec l’opération « Tapis magique», opération secrète qui permit d’emmener entre 1949 et 1950 la quasi-totalité des Juifs du Yémen (environ 49.000 personnes) en Israël, une poignée (1.200) décidant de rester. Ensuite, l’émigration s’est poursuivie par petits groupes, vers Israël ou les Etats-Unis. En 2009, une soixantaine de Juifs sont exfiltrés vers New-York. En 2016, une nouvelle opération spéciale secrète en pleine guerre civile, évacue 200 dont le rabbin de la communauté et un rouleau de la Torah datant de plus de 600 ans. Cette opération marque officiellement la fin des opérations de transfert par l’Agence juive. En 2021, 13 sont évacués vers l’Egypte. Il ne resterait que un seul Juif au Yémen :Levi Salem Musa Marhabi actuellement emprisonné par les forces rebelles Houtis

L’affaire des enfants disparus

Mais l’affaire la plus douloureuse en lien avec la communauté yéménite concerne la disparition de centaines d’enfants (le nombre exact n’est pas connu, on parle de plusieurs centaines à 1.500). En effet, à leur arrivée en Israël, beaucoup d’enfants, éprouvés par leur périple, étaient très affaiblis et furent envoyés en convalescence dans des hôpitaux. Certains furent déclarés morts. Leurs parents ont été informés que leurs enfants étaient décédés à l’hôpital mais n’ont pu voir ni le corps, ni la tombe. Des soupçons sont nés sur la réalité de ces décès.

Trois enquêtes gouvernementales se sont penchées sur l'affaire des enfants yéménites, comme on l'appelle, depuis les années 1960, et toutes ont conclu que la plupart des enfants sont morts de maladies et ont été enterrés sans que leurs parents en soient informés ou impliqués. Selon le personnel médical, certains enfants décédés furent enterrés sans que l’on puisse prévenir leurs parents en raison de la désorganisation entourant l’arrivée des Yéménites et notamment du mauvais enregistrement des noms. Des rumeurs persistantes au sein de la communauté yéménite évoquent le fait que ces enfants aient été donnés à des familles ashkénazes.

En 2016, sous la pression des familles victimes de ces pratiques et de l'opinion publique, Benjamin Netanyahu ouvre une enquête, les documents relatifs à l'affaire sont déclassifiés et mis en ligne. Tout cela a abouti à des révélations choquantes dans une commission de la Knesset sur des expériences médicales sur des enfants yéménites. Un témoignage donné sous serment lors de l'une des enquêtes précédentes a révélé que quatre bébés sous-alimentés sont morts après avoir reçu une injection expérimentale de protéines et que de nombreux enfants sont morts à la suite d'une négligence médicale. Des autopsies ont été pratiquées sur des enfants, qui ont ensuite été enterrés dans des fosses communes en violation de la tradition juive, a entendu la commission spéciale de la Knesset sur la disparition d'enfants. Dans certains cas, les cœurs des enfants ont été prélevés pour des médecins américains, qui étudiaient pourquoi il n'y avait presque pas de maladie cardiaque au Yémen.

Selon l’historien Tom Seguev, ces rumeurs d’enlèvement n’ont jamais été totalement confirmées. Il souligne que des centaines de milliers d'immigrants sont arrivés en Israël en temps de guerre, et dans les années qui ont immédiatement suivi, alors que le pays était encore sous le choc. "Tous ces gens sont venus dans des conditions très, très difficiles et c'est une histoire de chaos". La plupart des enfants sont probablement morts et « il n’a pas été prouvé qu'il y ait eu un complot organisé pour arracher des bébés yéménites et les donner à l'adoption ».

Reuven Rubin au Musée d’Art de Tel-Aviv

La vie de Reuven Rubin

Rubin Zelicovici est né le 13 novembre 1893 en Roumanie. Et mort le 13 octobre 1974 à Tel Aviv. Né dans une famille hassidique, il est le 8e de 13 enfants.

Il a beaucoup voyagé  pour étudier l’art : Jérusalem, Paris, New York. A 30 ans (en 1923), il immigre en Palestine.

Le style de Reuven Rubin

Il est l’un des fondateurs du style Eretz-Israël (moderne et naïf). Il peint les paysages bibliques, le folklore et les gens (Yéménites, Juifs hassidiques et Arabes), et des paysages de la Palestine historique et surtout ceux de Jérusalem et de la Galilée.

Il avait l'habitude de signer ses peintures ‘Reuven’ ou son prénom en hébreu et son nom en lettres latines

Le tableau

Dans ce portrait de groupe, Reuven Rubin peint sa famille comme s’ils posaient pour un photograhe de famille avec une séance de photos mise en scène. Mais pas dans un studio de photos, en plein air. La mère est assise au milieu du tableau, entourée de ses enfants Reuven, Yitzhak, et Chana, qui étaient tous réunis après leur immigration vers la terre d’Israël (après la mort de leur père en Roumanie). Rubin a choisi de peindre sa famille dans un paysage d’oliviers avec un feuillage argenté – un cadre qui fait clairement partie de son nouveau pays.

Rubin a fait attention de distinguer sa position de celle de sa famille en ce qui concerne sa pose et son apparence : le pinceau et la palette dans ses mains sont les attributs de sa profession. Il porte des pantoufles rouges et une chemise souple comme celle portée par les pionniers juifs, et est assis sur un tabouret de paille en accord avec le costume local; son apparence prouve son assimilation dan le pays, et se distingue du reste des membres de la famille, dont l’apparence boutonnée fait allusion à leur récente arrivée.

Ce portrait de groupe représente exactement la nouveau style de peinture naïf que Rubin a développé dès son arrivée dans le pays, et qui est inspiré du peintre Henri Rousseau. Rubin a examiné son nouvel environnement comme un enfant découvrant lemonde, en faisant attention à chaque détail (comme, par exemple, les fleurs sauvages dans la main de sa sœur). Il représente l’environnement local dans une lumière optimiste,et en contraste avec ses peintures de la Roumanie, comme « Tentation dans le Désert », cette peinture semble témoigner l’idée que l’artiste a trouvé sa place.

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